France
July 18, 2018
Des chercheurs de l’Inra, de l’université de Rennes 1 et leurs collègues mettent en évidence que l’agriculture biologique (AB) favorise la régulation naturelle et la maîtrise des bioagresseurs - pathogènes, ravageurs et plantes adventices. Ces résultats, publiés dans la revue Nature Sustainability le 16 juillet 2018, ouvrent des perspectives intéressantes pour réduire l’usage des pesticides de synthèse.
L’agriculture biologique (AB), sans pesticides de synthèse est considérée comme étant plutôt bénéfique pour la biodiversité. Ceci suggère que les niveaux de processus naturels supportés par la biodiversité, telle la régulation naturelle des bioagresseurs (ravageurs animaux, agents pathogènes et autres adventices) sont plus importants dans ces systèmes qu’en agriculture dite conventionnelle (AC).
Dans le cadre d’un consortium international, des chercheurs de l’Inra, de l’université de Rennes 1 et leurs collègues* ont exploré cette question à la faveur d’une analyse de grande envergure de la littérature scientifique, démontrant l’impact des pratiques de l’AB sur la stimulation de la régulation naturelle et le contrôle des bioagresseurs.
Les pratiques de l’AB stimulent la régulation naturelle des bioagresseurs
Araignée, Leptorchestes sp. mangeant une cicadelle.© Inra, Sylvie Richart-Cervera
Les chercheurs ont ainsi établi que la régulation naturelle des bioagresseurs (qu’il s’agisse de taux de parasitisme, de prédation ou de compétition) est plus importante dans les systèmes de culture AB que dans les systèmes AC et ce pour tous les types de bioagresseurs (pathogènes, ravageurs ou adventices). Un constat qui suggère que les pratiques de l’AB stimulent les processus naturels responsables de la régulation des bioagresseurs.
Les performances de l’AB pour la maîtrise des pathogènes, des ravageurs et des adventices dépendent du type de bioagresseurs
Cherchant à savoir si les niveaux de régulation, plus élevés en agriculture biologique qu’en agriculture dite conventionnelle, se traduisent par des niveaux d’infestation plus faibles, les scientifiques ont également observé qu’entre les systèmes de culture conduits en AB et ceux conduits en AC, les niveaux de maitrise des bioagresseurs dépendent du type de bioagresseurs.
Ainsi, les systèmes de culture conduits en AB subissent des niveaux d’infestation par des agents pathogènes (par exemple, champignons ou bactéries) plus faibles que ceux conduits en AC. Par contre, AB et AC endurent les mêmes niveaux d’infestation de ravageurs (insectes, nématodes, acariens et autres). Enfin, les systèmes de culture AB montrent des niveaux d’infestation par les adventices plus élevés que les systèmes de culture AC ; leur présence contribuant vraisemblablement à la diversité des espèces antagonistes des bioagresseurs et à un environnement potentiellement moins propice aux maladies et aux ravageurs.
Ces résultats démontrent l’intérêt des pratiques culturales de l’AB en matière de régulation des bioagresseurs et de maîtrise des pathogènes et des animaux nuisibles. Ils ouvrent des perspectives d’intérêt pour réduire l’utilisation de fongicides ou d’insecticides de synthèse sans pour autant augmenter les niveaux d’infestation des pathogènes ou des ravageurs.
Au cœur de l’étude
Les scientifiques ont conduit deux méta-analyses :
• la première porte sur le potentiel de contrôle biologique, elle concerne 43 études soit 194 comparaisons entre les systèmes agricoles conventionnels et biologiques. Ces données comprennent des mesures du taux de prédation, des mesures du taux de parasitisme et des mesures de la suppression du sol, c’est-à-dire de la capacité du sol à réprimer les pathogènes après leur inoculation ;
• la seconde concerne les niveaux d'infestations pour les grands types de bioagresseurs. Elle inclut 134 études soit 594 comparaisons. Les données collectées intègrent l'incidence ou la sévérité des attaques liées à des maladies, l'abondance ou la densité des ravageurs, ou encore la couverture, la biomasse ou la densité des adventices, plus communément appelées « mauvaises herbes ».
* En France, sont impliqués : l’unité Santé et Agroécologie du Vignoble (Inra, Inra, Bordeaux Sciences Agro, ISVV) ; l’unité Biodiversité agroécologie et aménagement du paysage (Inra, ESA, Agrocampus Ouest) ; l’unité Ecosystèmes, Biodiversité, Evolution (Université Rennes 1, CNRS) ; l’Institut Ecosystèmes, Biodiversité, Evolution (Agrocampus Ouest, Université de Rennes 1).