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Réduire l’impact carbone de notre alimentation, oui, mais pas à n’importe quel prix


France
Ap[ril 15, 2016

Comment diminuer l’impact carbone de nos assiettes tout en ayant une alimentation nutritionnellement adéquate et acceptable sur les plans culturels et financiers ? Dans l’équation d’une alimentation durable, des chercheurs de l’Inra et d’Aix-Marseille Université* montrent à travers une étude de modélisation qu’il est possible de réduire les émissions de gaz à effet de serre tout en maintenant la qualité nutritionnelle d’un régime via des choix alimentaires réfléchis (plus de féculents, de fruits et légumes et moins de viande). Leurs résultats viennent d’être publiés dans la revue Public Health Nutrition.

Selon la FAO, une alimentation durable a une faible empreinte environnementale, elle est adéquate nutritionnellement, culturellement acceptable et abordable financièrement. Mais ces caractéristiques sont-elles compatibles ? Des chercheurs de l’Inra et d’Aix-Marseille Université ont simulé l’impact d’une réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’alimentation sur sa qualité nutritionnelle et son prix.

Pour construire cette étude de modélisation, les scientifiques ont utilisé les données recueillies dans l’enquête alimentaire INCA2**  sur le panier des consommations de 1899 adultes. Ils ont croisé ces chiffres avec les données d’impact carbone des 402 aliments les plus consommés en France, avec les prix moyens de chaque aliment et avec des indicateurs de la qualité nutritionnelle de l’alimentation. Les chercheurs ont défini et analysé trois types de modèles :
- le premier n’imposant aucune contrainte nutritionnelle (FREE), la seule contrainte étant celle de la diminution progressive des émissions de GES pour un apport calorique inchangé ;
- un second modèle imposant diminution des émissions de GES et respect de l’équilibre en macronutriments : protéines, lipides, glucides (MACRO) ;
-et enfin, un modèle nutritionnellement adéquat (ADEQ) imposant non seulement l’équilibre en macronutriments mais également la totalité des apports nutritionnels conseillés en vitamines, minéraux, oligoéléments, fibres, acides gras essentiels, et les valeurs maximales recommandées pour le sodium, les acides gras saturés et les sucres libres.

Résultats : avec les modèles FREE et MACRO, la réduction des émissions de GES de plus de 30 % diminue le prix des paniers modélisés mais entraîne une dégradation de leur qualité nutritionnelle.
Ainsi, le respect des recommandations sur les macronutriments ne suffit pas à garantir la qualité nutritionnelle. Il faut avoir recours au modèle ADEQ pour générer des paniers nutritionnellement adéquats tout en imposant la diminution progressive des émissions de GES :
-    La couverture des besoins nutritionnels nécessite d’emblée une augmentation de la quantité de fruits et légumes.
-    Puis, pour réduire les émissions de GES tout en maintenant l’adéquation nutritionnelle, il faut diminuer progressivement les quantités de viande, viande de ruminant et charcuteries en priorité.
-    Enfin, pour des réductions d’émissions de GES supérieures à 40%, il devient alors nécessaire de supprimer totalement la viande et les plats qui en contiennent mais aussi d’augmenter considérablement les féculents (pomme de terre et céréales). Il est même possible d’atteindre jusqu’à 60% de réduction des émissions de GES avec le modèle ADEQ, mais ce résultat reste très théorique. En effet, l’acceptabilité sociale, une caractéristique pourtant fondamentale de l’alimentation durable, risque alors d’être sérieusement mise à mal, tant l’écart avec les consommations habituelles serait important.

Cette étude révèle donc la nécessité de prendre en compte finement la qualité nutritionnelle comme un indicateur incontournable lorsqu’il s’agit l’améliorer la durabilité de notre alimentation. Puisqu’un régime durable se doit d’être réaliste, une réduction de 30% des GES semble un objectif atteignable via la modification des choix alimentaires. L’optimisation de la production et la transformation des systèmes alimentaires restent d’autres leviers à explorer pour réduire encore plus l’impact environnemental de notre alimentation.

Une méthodologie hybride pour une évaluation standardisée de l’impact carbone des aliments
La même équipe de l’Inra, en collaboration avec AgroParisTech, vient également de publier dans PLOS ONE une étude1 visant à comparer et évaluer les forces et les faiblesses de deux bases de données sur les émissions de GES des aliments les plus consommés en France. La première a été construite avec les données d’émissions de GES issues de la littérature scientifique (Analyses du cycle de vie (ACV) publiées sur des aliments spécifiques) tandis que l’autre a été obtenue en employant une méthode mixte (ACV couplée à Output-Input) permettant l'évaluation standardisée des impacts environnementaux d’aliments génériques. Cette étude révèle bien les points forts de cette méthode hybride, validant ainsi son utilisation pour l’analyse  de l’alimentation durable, dans les études épidémiologiques en particulier 
Bertoluci G, Masset G, Gomy C, Mottet J, Darmon N. How to build a standardized country-specific environmental food database for nutritional epidemiology studies. PLOS ONE. 7 avril 2016 

* Ces travaux ont été financés par le projet ANR Offrir et Consommer une Alimentation Durable (OCAD) et par la fondation Daniel et Nina Carasso, dans le cadre du projet AVASUN (prise en compte de la biodisponibilité des nutriments dans la recherche d’une alimentation durable).
** Etude individuelle nationale des consommations alimentaires, réalisée en France en 2006-2007.

 



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Website: https://www.inrae.fr

Published: April 15, 2016


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