France
January 22, 2016
Au sein d’une population de blé tendre issue du croisement de 60 parents puis d’un brassage génétique pendant douze générations, un ensemble de 1000 lignées hautement recombinantes a été extrait et analysé : 26 régions génomiques impliquées dans l’adaptation de cette population ont été identifiées dont six sont associées à la précocité de floraison.
La cartographie génétique reste une voie majeure pour identifier les variations génétiques impliquées dans un caractère d’intérêt agronomique, notamment les régions chromosomiques ou locus impliqués dans la variation des caractères quantitatifs (en anglaisQuantitative Trait Lociou QTLs). Chez les plantes, cette cartographie a été longtemps basée sur des croisements biparentaux. Différents dispositifs alternatifs ont été développés ces dernières années, soit en connectant différents croisements biparentaux par l’utilisation de génotypes communs (en anglais Nested Association Mapping ou NAM), soit en croisant plusieurs parents dans une même population (en anglais Multi-parent Advanced Generation Inter-Cross ou MAGIC). Ce dernier dispositif, en permettant la ségrégation de plusieurs allèles dans une même population, offre des possibilités uniques de cartographie.
Une population MAGIC
Des chercheurs de l’Inra et leurs collègues ont développé une population MAGIC de blé tendre par brassage, pendant 12 générations, de 60 fondateurs - les croisements ont été facilités par l’introduction d’un gène de stérilité mâle. Pendant ces brassages, réalisés au champ, la population s’est adaptée aux conditions environnementales locales. Près de 1000 lignées ont été extraites par autofécondation (en anglais Single Seed Descent ou SSD) de la population recombinante, à fin d’analyses génétiques.
Un ensemble de 400 lignées a été génotypé à l’aide de quelques 6 000 marqueurs (en anglais Single Nucleotide Polymorphisme ou SNP), alors qu’un phénotypage ciblé sur la précocité de floraison était effectué (sept conditions climatiques).
Deux méthodes d'estimation
Le développement d’une méthode d’estimation a permis de déterminer les contributions des 60 parents à la population MAGIC initiale. Un second estimateur a permis de détecter les régions génomiques soumises à sélection, à partir des variations temporelles de fréquences alléliques, et d’estimer les taux de sélection les plus probables. Il a conduit à identifier 26 régions génomiques soumises à sélection pendant la phase de brassage génétique. L’analyse des données phénotypiques par génétique d’association a permis d’associer six de ces régions à des locus de caractères quantitatifs (QTL), contrôlant la précocité de floraison. Enfin, l’analyse de l’association entre les allèles, encore appelée déséquilibre de liaison, a confirmé le haut niveau de brassage génétique de la population.
Vers l'analyse de caractères d'intérêt agronomique
La disponibilité de cette population MAGIC permettra d’analyser d’autres caractères d’intérêt agronomique, grâce à des phénotypages complémentaires, notamment des caractères d’intérêt pour des conduites agroécologiques. En pratique, les scientifiques étudient actuellement ce matériel original pour cartographier des gènes impliqués dans l’aptitude à la culture en mélange variétal.
D'ores et déjà, le nombre de marqueurs SNP a été multiplié par 40, sur l’ensemble des 1000 lignées (projet BREEDWHEAT et métaprogramme Inra Sélection génomique), ce qui offre des conditions uniques pour faire de la cartographie de précision.
Plus largement, ces résultats ouvrent des perspectives sur l’utilisation de populations hautement recombinantes implantées in situ en réseau, pour accélérer la détection puis l’utilisation de QTLs impliqués dans l’adaptation à de nouvelles contraintes biotiques ou abiotiques.
Ce travail et les résultats qui l'accompagnent, constituent un des faits marquants de l'Inra Versailles-Grignon au titre de l'année 2015.